EN
“The things that guide me are actually very concrete questions, how to film a hand, how to remain on that hand and then how at a certain moment to move to a face, and then I cut, and how do I return to that hand, and then back to the fade, and then back again, and that rhythm gives rise to something in me that allows me to move towards something I don’t really know, to get close to a space where there is an immense desire.”
Philippe Grandrieux
“Instead of the heavy 35mm camera painfully held on the shoulder for Sombre, it’s with a small DV camera (and all that involves) that Grandrieux has shot Un Lac, with a freedom of mastered improvisation which is felt throughout the entire film […]. And thus the camera’s most directly sensitive recording capacity accompanies a will of great abstraction in the way that Grandrieux treats each of the components of the film, in the editing and the sound design, which is entirely constructed, as well as in the decision of lowering the level of light sensitivity, carefully respected from the shooting to the digital colourgrading and the blowup to 35mm. All of this seems to suggest that we are in front of a new way of negotiating the relation between the ‘two biggest trends in cinema, the design-tendency and the recording-tendency’. Serge Daney added ‘two ways of engaging the inhuman in the human’, explaining that it would be ‘in the middle, the ‘scene-tendency’ […] that the inhuman is kept at a distance’.”
Raymond Bellour
FR
« Je me laisse emporter, fasciné par ce qui ne cesse de transformer devant moi, par ce que je vois si mal et que je désire d’autant plus. Je fouille l'image, m’y enfonce et m’y perds. J’emmène les acteurs avec moi, vers ce que je ne sais plus. Je les guide par la main dans cette obscurité nouvelle, de sorte qu'à leur tour ils ne sachent plus où ils en sont, ce qu'ils font, ce qu'est la scène, ce que l'on tourne. Egaré dans cette nuit obscure où les impressions et les affects ne sont plus séparé, où l’intelligence, comme le recommandait Proust, cède le pas à la sensation, je ressens une sort d'exaltation, j’éprouve le sentiment puissant du film que se fait, malgré moi, au-delà de moi, l) où je ne pouvais pas le pense ni le vouloir, mais juste l’attendre. Alors je vais à nouveau vers eux, la lumière si faible m’aveugle, leurs souffles et au loin le fracas assourdi des avalanches m’enveloppent. J’avance dans mon sommeil. Mes pas chancelants de somnambule me conduisent plus profondément dans la matière du film, et mon cœur battant à l’unisson du sien, à l’unisson de tout ce qui m’entoure, de tout ce qui arrive, je ferme les yeux. Et c’est noir. Et tout continue encore. Tout m’envahit. Je filme. C’est le Réel que je filme. »
Philippe Grandrieux