Several dogs are being trained as patrol dogs. Their owners teach them the choreographies of police work: biting and letting go, following and staying, always on their owner’s command. Longingly gazing upwards, the dogs seem intimately connected with their owners. They are tamed and domesticated; their life is directed by humans. At the same time they are always the elusive other. A gap divides humans and animals, and from the other side these dogs see us.
« Depuis l’invention du berger allemand à la fin du 19e siècle, toute une biopolitique martiale de sélection génétique est venue institutionnaliser la race, ses caractères comportementaux et ses caractéristiques physiques. L’historicité de cette évolution est remarquable. Ces chiens utilitaires, premiers systèmes d’armes intelligentes mis en œuvre dès la première guerre mondiale, sont les fruits d’une sélection biologique, d’une gestion des populations, d’une épistémologie et d’une typologie raciale, de stratégies économiques de « production de sujets et d’objets de race pure »1 . Cette création biologique au sein de la « natureculture » (un concept cher à Haraway, qui vient sans cesse questionner la dimension historique de la constitution de la nature) n’est pas un incident sans conséquences.
« Une espèce de compagnie ne peut exister seule ; il en faut au moins deux pour en faire une. » Les hommes et les chiens sont inextricablement pris dans les fils de la co-constitution et de la coévolution. Les pratiques corporelles, professionnelles, martiales, sécuritaires des forces de police canine ne peuvent être démêlées de la relation avec leurs partenaires chiens policiers. Ils sont attaches les uns aux autres, historiquement et physiquement, de part et d’autre de la laisse. La survie du berger allemand, tout comme la survie du corps de police des brigades de maitres-chiens, dépendent de « pratiques de travail délibérées ».
Nina de Vroome expose des corps canins a l’affut, des muscles en tension, des regards obscurs (c’est une caractéristique de la race) concentrés, des langues et de la bave, des respirations haletantes, suspendues à l’attente d’un ordre, d’une indication. Des chiens au travail, qui réalisent « une tache complexe qui exige un contrôle de soi et des capacités émotionnelles et cognitives canines », et des technologies pédagogiques, entre incitation et répression : des récompenses minutieusement dosées (une friandise comestible, une caresse) et des colliers étrangleurs. Si on assiste au dressage, qui transforme tous les individus de la relation, et a la domestication, « l’acte d’auto-engendrement masculin et monoparental par excellence à travers lequel l’homme se construit continuellement soi-même à mesure qu’il invente (crée) ses outils », il conviendrait néanmoins de prévenir une lecture anthropocentrée du film. Il ne tient qu’à nous de voir ce film pour ce qu’il nous montre et non pour ce qu’il pourrait nous montrer de nous-mêmes. « Les chiens ne renvoient pas à l’humain. C’est d’ailleurs ce qui en fait toute la beauté ». »
Clem Hue2