Mon besoin de cinéma
Ce soir aurait été la soirée d’ouverture de la 19ème édition du Festival Courtisane à Gand. En raison de la rapide propagation du virus COVID et des mesures de protection prises à son encontre, les organisateurs du festival ont été contraints d’annuler entièrement l’évènement, y compris la première partie du programme Out of the Shadows qui devait être présentée à Gand durant le festival, la seconde étant prévue en juin à la CINEMATEK à Bruxelles. Courtisane examine actuellement les possibilités de réorganiser ou de postposer ces programmes. En tout cas, le festival a la ferme intention de présenter cette programmation – que ce soit cette année, ou lors de la prochaine édition du festival, en 2021.
En se plongeant dans une histoire cinématographique aussi vaste et riche que celle de la Méditerranée arabe, on découvre une grisante multitude de formes et de manifestations. Depuis l'époque du cinéma muet jusqu’à nos jours, les cultures cinématographiques régionales du Maghreb et du Machrek ont produit une myriade d’œuvres remarquables. Pourtant, en examinant les historiographies canoniques du cinéma, on ne peut s’empêcher d’être frappé par leur relative obscurité, d’autant plus grande lorsqu’il s’agit de films réalisés par des femmes. Bien que le nombre de réalisatrices arabes ait notablement augmenté au cours des dernières décennies, le travail de nombreuses pionnières tend à rester douloureusement négligé. Le programme Out of the Shadows a pour but de remédier à cette obscurité et de revitaliser le travail d’une diversité de cinéastes dont les films restent négligés et peu projetés.
À l’occasion de ce programme, Courtisane, Sabzian et le KASK School of Arts ont uni leurs efforts pour rédiger une publication d’accompagnement, axée sur le travail de cinq femmes cinéastes arabes : Atteyat Al-Abnoudy, Selma Baccar, Assia Djebar, Jocelyne Saab et Heiny Srour. Originaires d'horizons et de régions différents, ces cinéastes ont toutes commencé à produire des films dans les années 1970, à un moment de grand bouillonnement politique et culturel. Travaillant souvent à contre-courant, elles ont choisi de dédier leur attention à des voix et histoires qui sinon risquaient d’être noyées par l’Histoire officielle. Chacune de ces cinéastes a développé une approche personnelle et audacieuse du cinéma, mais leurs œuvres explorent des thèmes communs tels que la mémoire et l'identité, l’oppression et la libération, la violence et l'exclusion, et le rôle social et politique des femmes dans les sociétés et les histoires arabes.
Chacune de ces cinéastes – dont les œuvres auraient été présentées côte à côte pour la première fois à l’occasion du festival – a été façonnée par des traditions et des réalités différentes, car la femme cinéaste arabe n’existe pas plus que la femme arabe. Ce programme cherche donc à suivre l’appel d’Assia Djebar « ne pas prétendre ‘parler pour,’ ou pire ‘parler sur,’ à peine parler près de, et si possible tout contre ». Dans cette optique, cette publication rassemble une sélection d’écrits et d’interviews qui parlent en « se dressant contre » les films du programme. Les textes, dont la plupart ont été traduits pour la première fois en anglais pour cette publication, sont les témoignages des pratiques singulières de ces femmes – pratiques cinématographiques sorties de l’ombre (out of the shadows) – qui sont rassemblées ici, les unes contre les autres, dans l’espoir d’éclairer leur riche et inspirant travail, et d’en élargir la portée et l’appréciation.
La sortie effective de la publication n’étant pas claire pour le moment, Sabzian en publie un premier texte, de la cinéaste et écrivain algérienne Assia Djebar (1936-2015).
Djebar a été la première femme algérienne à fréquenter l’École normale supérieure de jeunes filles en dehors de Paris. Pendant la guerre d’indépendance de l’Algérie (1954-1962), elle a travaillé avec Frantz Fanon pour le journal El moudjahid, menant des interviews avec des réfugiés algériens en Tunisie et au Maroc, avant de continuer à enseigner l’histoire à Rabat puis à Alger. Entre ses vingt et trente ans, elle a écrit quatre romans. Au milieu des années 60, elle décide d’abandonner l’écriture en français, la langue du colonisateur d’Algérie. Le cinéma lui offre de nouvelles façons d’aborder la langue ainsi que le monde des femmes de sa région natale, ce qui aiguise son attention pour les sons parlés et chantés. « J’ai pris la décision de faire un film, sans que je sache vraiment si je suis cinéaste. Je l’ai prise en 1975, et je peux même... peut-être pas vous dire le jour, mais je pense en novembre 1975, parce que c’était le jour de la mort de Pasolini. Et que quelque part, je pensais que je rencontrerais cet homme. Et que tout son rapport à la poésie populaire, aux parlers dialectaux de ces régions, qu’il a fait passer d’une certaine façon à l’écran, c’était ce qui me concernait. » Pour filmer La nouba des femmes du Mont Chenoua en 1975-77, Assia Djebar retourne dans la montagne de Chenoua afin d’écouter et de donner voix aux histoires orales de femmes qui sinon seraient autrement réduites au silence. Le film est récompensé par le Prix de la critique au Festival du film de Venise en 1979, mais reçu avec hostilité à Alger, où il est considéré comme trop « personnel » et donc frappé d’anathème par rapport au projet nationaliste de l’Algérie décolonisée. En 1980, elle reprend sa carrière d’écrivain avec Femmes d’Alger dans leur appartement, un recueil d’histoires exprimant la mémoire collective de l’Algérie à travers les récits polyphoniques de voix féminines. Ce livre devait être le germe d’un film sur les femmes urbaines d’Alger, destiné à compléter l’autre moitié, sur les femmes rurales de l’arrière-pays. Mais pour ce qui s’avère être son dernier film, La Zerda ou les chants de l'oubli (1978-1982), elle passe plutôt deux ans à trier des images d’archives tournées par les colonisateurs français dans la première moitié du XXe siècle, les tissant en une vision alternative de l’histoire du Maghreb. Tout en devenant l’une des figures les plus importantes de la littérature nord-africaine, Assia Djebar a continué à soulever la question de la langue des femmes et de la circulation des voix féminines, tout en développant ce qu’elle a appelé son « propre genre de féminisme ».
Dans le texte ci-dessous, rédigé pour un colloque à l’Université de Victoria à Vancouver en 1994, centré sur son travail et celui de Sembène Ousmane, Djebar se demande ce qui, en dépit de tous les obstacles et obstructions, l’attire vers le domaine du cinéma, ce que le cinéma en tant que travail signifie pour elle, quel est précisément son « besoin de cinéma » ?
Gerard-Jan Claes et Stoffel Debuysere
1. Pourquoi ai-je besoin d'une écriture de cinéma ?
Le cinéma pour moi n’est ni un « métier » – au sens d’une carrière –, ni une « vocation » – au sens d'un appel. Quoi donc, pour moi qui ai réalisé un premier long-métrage peu après l’âge de quarante ans (1976-1977), puis un second (1982), peu après quarante-cinq ans.
Dix ans après ou davantage – où certes se sont succédés pour moi pas moins de six scénarios que je cherchais à réaliser en coproduction franco-algérienne, dont deux aboutiront à des textes « rendus » à la littérature, mais tous projets bloqués d'une façon ou d'une autre par le cinéma d'État algérien –, dix ans après donc, que représente pour moi le cinéma comme travail : projet, réflexion et tentative d’une réalisation... ?
Je vais m’interroger devant vous, puisque le hasard m’a mise, aujourd’hui, aux côtés du pionnier du cinéma africain, Sembène Ousmane, voisinage qui me pousse forcément à la modestie, et c’est pourtant ce qui me permet de me situer, j’allais dire « hors champ », disons simplement ailleurs.
« Ailleurs », en tant qu’écrivain venant sur le tard à l’image-son. Ailleurs, comme femme avec un héritage culturel arabo-islamique où l’interdit sur l’image se cristallise plus que jamais sur le corps de la femme.
Ailleurs enfin, comme Algérienne, au moment où mon pays, après trente ans d’indépendance que j’ai traversés avec lui, explose, risque de se disloquer, s’ensanglante et cherche dans le sang et la détresse aveugle un avenir ou un non-avenir, je ne sais, bref, dans ce tunnel où piétine aujourd’hui ma communauté, comment voir, quoi voir et faire voir ?
Pourquoi suis-je encore aiguillonnée par un désir de cinéma, moi qui, toutes ces précédentes années, me confrontais à la production algérienne, elle qui aidait aisément des films de cinéastes du tiers monde (égyptiens, libanais, sénégalais, ou même occidentaux), mais sur place me marginalisait parce que femme, et que je persistais, en outre, à pratiquer un cinéma de recherche, et non de consommation… ?
Moi donc qui me situe « hors champ » par rapport au cinéma algérien de l’indépendance, je vais tenter de vous parler de mon besoin de cinéma, qui subsiste malgré tous ces freins.
2. L’Algérie, depuis environ 1986, c’est-à-dire, après tout, moins d’une décennie, est, du fait des paraboles de télévision, sous l’arrosage quotidien du flot d’images conçues ailleurs, avec le plus souvent une langue ou des langues d’ailleurs, avec l’exposition obsédante d’objets de consommation vendus et consommés ailleurs (chocolats, fromages, déodorants, lessives, voitures, etc.), enfin avec un défilé de corps humains, habillés ou nus, ou à moitié nus renvoyant à une pseudo-sensualité filmée à plat et excitant indéfiniment un voyeurisme de frustration…
L’Algérie certes n’expérimente là que la situation vécue par de multiples pays du tiers monde (Amérique latine, Caraïbes, certains pays d’Asie…) où, plus augmentent la pauvreté, la dépendance, l’inégalité sociale criante, davantage est proposée en antidote soporifique, comme anesthésie et supposé défoulement visuel, l’imagerie occidentale dominante.
En même temps, les « news » internationales (CNN et autres journaux médiatiques) cachent ou déforment le réel des tensions de la terre, tout en faisant semblant de nous les montrer, dans leur éphémère.
Je ne prétends pas faire ici un constat politique ou idéologique, pour esquisser l’état spéculaire de mon public naturel, soumis plus que jamais à cette domination audiovisuelle ; c’est simplement ici un jugement esthétique de ma part.
Il est certes banal, quand on vit à New York, Paris ou Vancouver, de dénoncer la sous-culture de la majorité de cette production télévisuelle. Il n’en reste pas moins que tout cinéaste authentique, tout photographe, tout peintre ou sculpteur, ne peut travailler désormais que le dos tourné, les yeux fermés à ces millions de fenêtres, lucioles de l’illusion, et bien davantage de la médiocrité, du rien.
Mais, quand pour le public du tiers monde, quelques-uns tentent de chercher, par l’image-son, une fragile vérité des leurs, évoquer, comme je viens de le faire, la consommation massive du non-consommable (concrètement parlant), ceux-ci ne peuvent que s’installer d’emblée, qu’ils le veuillent ou non, dans la fracture de regard, dans la béance de l’absence, dans l’arête infinie de la frustration : en somme dans la violence.
À plus forte raison pour la culture algérienne dont l’élite – aujourd’hui à nouveau menacée – avait à panser les blessures d’un viol colonial de plus d’un siècle et d’une guerre de décolonisation douloureuse.
Panser les blessures et re-penser son histoire, sa mémoire, sa durée intérieure surtout, et ce, par des langages qui tâtonnaient à se vouloir pluriels.
(Il est à rappeler que le cinéma algérien, pendant trente ans, seule expression culturelle financée par le pouvoir pour le bénéfice de quelques-uns, aux prétentions presque hollywoodiennes, se voulut « pompier » – je dirais, d’une « esthétique de pompes funèbres » –, saint-sulpicien même, avec un pseudo-lyrisme de oursouflure et un populisme démagogique. Cinéma officiel qui a sévi, mais sans public véritable, auquel l’on donna certes une palme d’or à Cannes – alors que, dans les pires difficultés, trois ou quatre réalisateurs, authentiques cinéastes, réussissaient à réaliser un, quelquefois deux films d’auteur tout au plus…)
Dans ces conditions, l’image de télévision n’a pas été une simple sous-culture envahissante, d’endormissement et d’absence entretenus ; elle a opéré en instrument de dépossession et d’acculturation accélérées.
Je pense même que, dans le cas algérien, l’image-son télévisée – et, également, une certaine production de cinéma tournée à coups de millions de l’État vers le « grand spectacle » pseudo-historique –, cette image a fonctionné comme arme de destruction identitaire, délibérément.
3. Puisque cette rencontre de Victoria s’intitule « Écrits/Écrans », je résumerai le point où je me trouve, en cette fin d’année 1994.
Je me débats depuis deux ans dans l’impossibilité de dire le sang, la mort, la haine – de dire, c’est-à-dire de l’inscrire par l’écriture littéraire. (Ce n’est pas par hasard que mon dernier roman, Vaste est la prison, commence par un prologue « Le silence de l’écriture » et se termine par « Le sang de l’écriture ».)
En somme, le genre romanesque m’a servi à évoquer l’amont de la crise actuelle : c’est-à-dire, à mes yeux, la conquête d’un espace au féminin sur la terre algérienne – et, à peine cet espace commence-t-il à se faire visible, à permettre un début de jubilation pour quelques-unes d’entre nous, que l’effacement, le risque de dissolution apparaît et envahit tout !...
Mon rapport au réel d’aujourd’hui est aussi marqué par la tentation de recourir à l’image-son, celle-ci dans le cadre du plan cinématographique, à le créer en tableau mobile, comme un récit concentré.
Oui, passer à la « création audiovisuelle » (est-ce vraiment cette formule qu’il faut avancer ?) pour me confronter, pour me mesurer et donc « produire », c’est-à-dire « inventer » (et l’on n’invente, disait récemment Jacques Derrida à Lisbonne, que l’impossible) – inventer, oui, le face-à-face avec quoi, sinon avec la violence crue, avec le mal hurlant et délirant, avec le meurtre et le pas omniprésent de la mort, là-bas, chez moi.
Je dirais ceci me paraît énorme, qui me semble impossible justement, qui me ferait entrer en transes, je le dirais, oui : à l’idée d’une possible agonie de l’Algérie, par défi, par entêté espoir, l’écriture – de cinéma ou de littérature – doit rendre présente la vie, la douleur peut-être mais la vie, l’inguérissable mélancolie mais la vie !...
Devant les sanguinolentes traces et menaces, devant l’écarlate hideux d’un quotidien algérien, restituer surtout la palette du blanc, des gris, des nuances de bruns, de vert-gris, de bleu cendre, toute l’écharpe d’un ciel d’avant-aube…
Vous constatez : comment se prémunir devant les images jetées en vrac aux yeux du monde « civilisé » d’une réalité convulsionnaire (au Rwanda, en Somalie, en Bosnie, dans tant d’autres lieux béants de tragédie !...) ? En images-son, il nous faut renouer pourtant avec un cinéma non d’expérimentation, mais d’expérience – comme s’il nous fallait traverser, yeux bien ouverts et ouïe affûtée, des Saharas de solitude pour un écran lavé.
4. Certes, enfoui sous la saleté et la vulgarité d’images conventionnelles coulant à flots pour mon public – que l’on veut déboussoler, déstabiliser pour le faire rentrer dans le rang du conformisme et de la servitude sans espoir –, un cinéma de silence coloré et de bruits premiers ne serait ni d’avant ni d’arrière-garde, mais de survie, parce que de rythme originel.
Il se remettrait, cinéma « algérien » d’une Algérie vive, vivante et multipliée, à cerner la vie dans ses pulsations (soupirs d’animaux, palpitements de feuilles, souffles du vent et mugissements du fleuve pour accompagner enfin la voix et le corps d’une Algérie presque interdite, en tout cas souterraine et jusqu’à présent rarement aperçue, à peine devinée…).
Je rêve, vous le voyez. Est-ce de ce cinéma rêvé dont je voulais vous entretenir ? Non pas… C’est une esquisse pour un cinéma d’allégement, de traces et de renaissances. De quête, certainement…
Où serait pourtant, dans cette immanence qui risquerait d’être informe, la réflexion (ou la station) de l’Histoire, et cela par le déroulé d’une simple histoire ?... Viendrait s’exercer un cinéma de fiction, non pour éveiller des émotions, plutôt pour ré-installer une véritable durée – alors que le passe-temps télévisuel coagule le temps, le vide et le plombe.
5. Rassurez-vous : si le hasard de la production me faisait revenir à la réalisation de films – de fiction, pour un public de salles –, certes oui, je déroulerais un récitt, une suite d’apparentes anecdotes. En somme, une continuité.
Mais d’une façon ou d’une autre, resurgiraient, sans doute en arrière-plan, quels paysages d’aujourd’hui de la désolation, de la destruction ?... Comment se placer dès lors, comment cadrer, quoi évoquer de biais dirais-je, en m’approchant peu à peu, en reculant quand il y a excès (j’appelle ici « excès » le défaut de sur-nommer car la face de la haine, filmée trop à plat, ne signifie plus rien, se banalise alors qu’il faut laisser sourdre quel mystère, quelle horreur ?...).
Et je pense soudain au superbe dernier film de Robert Bresson, L’argent : tandis que le sujet apparemment central est l’histoire d’un crime, en un seul plan, vers la fin, la caméra a une double approche, à la fois avancée et recul devant le geste meurtrier. C’est tout : presque rien n’est visible, tout est communiqué pourtant de l’horreur tragique.
Ainsi, il y a nécessité, dans le « cinématographe » digne de ce nom, de montrer et de masquer, de déplorer et de ne pas pleurer, de se durcir au contraire pour que se nidifie la tendresse perdue, en somme recevoir et refuser la violence par un regard qui se blesse et par la voix qui se dresse.
Là est l’ambiguïté : quelques pas d’hésitation s’esquissent devant la mort en mouvement, pourtant le désir persiste, non pas de témoigner dans l’immédiat, plutôt d’espérer librement le désir de meurtre sans le meurtre, le désir aussi de victimisation sans la victime, celle-ci de cette façon alors épargnée.
Ambiguïté et surtout aporie : pourquoi devant la mort en acte, l’image-son, en se cherchant et se fécondant, monte la garde, prend garde et regarde tout à la fois la violence-nuit ?
L’image-son neutre, mise au blanc, lâchée à blanc, se désamorcerait juste avant, ou juste après, hélas. Trop tard, jamais trop tôt, hélas encore ! Qui montrer, qui mettre en jeu, quoi jouer et revivre, devant l’œil terne et vorace de la mort ? Œil crevé.
6. Mon besoin d’une écriture de cinéma ? Certes oui, mais les yeux bien ouverts, l’oreille fichée loin dans le temps et retrouvant peu à peu, au bout du silence, du désarroi et du blanc net, ou vierge, ou Sali, retrouvant la durée de la vie…
Ai-je parlé plus haut d’une Algérie en agonie, de son corps presque prêt à être transporté vers la morgue proche, pour autopsie après le crime ?
Non. Avoir besoin, chacun de nous, d’images-sons, d’un cinéma pour la reviviscence, la renaissance, et le frémissement d’une Algérie tatouée : voici donc ce dont se nourrit aujourd’hui mon besoin de cinéma, désir informe peut-être, désir prolixe, je le crains et m’en excuse devant vous.
Ce texte a été publié originalement dans « Ecrit/Ecran : Assia Djebar-Sembène Ousmane, » [Colloquium] University of Victoria, Vancouver (Octobre 1994).
Image (1) Tournage de La nouba des femmes du Mont Chenoua (Assia Djebar, 1977)
Image (2) de La nouba des femmes du Mont Chenoua (Assia Djebar, 1977); Les femmes dans la grotte de Tipasa
Image (3) de La Zerda ou les chants de l’oubli (Assia Djebar, 1978-1982); Jeune filles de Tlemcen. Groupes de Biskra. Premiers autochromes, 1922