Amsterdam Afterbeat

Amsterdam Afterbeat

Johan van der Keuken: “We kept the ends of a lot of shots in Amsterdam Global Village: the camera leaves the subject and pans to the sound woman, who quickly taps the microphone. These taps later in the cutting become the references for synchronising picture and sound. This film is the rhythmic sequence of these taps, in which something of a story can be seen.”

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« Un autre film se permet une audace structurelle, en se situant au-delà du dernier seuil. C’est Amsterdam Afterbeat, montage de fragments de fin de plans, succession de « claps », ces coups qui servent à synchroniser image et son. On est ici dans la reprise d’une posture moderne, celle de Schwitters, qui, dès 1919, composa un tableau fait de rebuts. Réhabilitant tout ce qui n’est pas noble, l’exposant au regard, Amsterdam Afterbeat met en question la ségrégation entre « sujets » dignes et « objets » indignes. Keuken, avec ce film clin-d’oeil, renverse la hiérarchie, en magnifiant sur l’écran ce qui finissait au chutier. Moments vertigineux, qui révèlent qu’il y a encore quelque chose au-delà des limites convenues, qu’il n’y a pas de frontières à l’objet artistique : les chutes de pellicules peuvent constituer la matière d’un film.

Ce making-of d’Amsterdam Global Village est aussi un manifeste vantant l’art du contre-pied. Marquant les armatures invisibles qui relient visible et audible, il souligne l’importance du beat, de la mesure. Il affirme la nécessité de positionner l’image dans le temps, le son par rapport aux images (question du tempo, des contretemps). Il montre combien le cinéma est un art de la durée maîtrisée, de l’espace reconstruit. Le film s’amuse de tous les décalages possibles lors du clap : caméra ratant le contact, coup mal donné et répété, glisse sur la mesure juste. Jouer sur l’afterbeat, l’après-coup, est une attitude fondamentale que Keuken a empruntée au jazz et qui lui permet d’impulser le fameux swing :

« II s'agit d'être juste devant ou juste derrière le rythme, c'est là le swing. Les grands improvisateurs, très souvent, jouent en retard. Si tu écoutes Lester Young ou Miles Davis, ils sont toujours un peu paresseux par rapport au rythme. On attend, puis on remplit, et c'est ça qui donne le swing » »

Thierry Nouel1

  • 1Thierry Nouel, « Johan van der Keuken, Cinéaste des Seuils », ZIN TV, Janvier 2012.
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UPDATED ON 27.11.2024